L'Herboriste

Un bien triste patient était présent en ce jour. Kantz était étendu sur une table de bois recouverte d'un drap blanc dressé la pour l'occasion. Kantz Regenhalt, un jeune homme qui n'avait commit pour seul crime que d'être présent au mauvais endroit au mauvais moment, qui pouvait lui reprocher d'avoir commit une seule erreur? Personne, pourtant, il se trouvait étendu ici avec une flèche dans la gorge, pas encore mort mais avec les yeux de la faucheuse braqués sur lui.

L'herboriste était tendue, pour autant il ne fallait pas oublier qu'elle n'était pas dupe: elle savait ce qui l'attendait si elle devait soigner des blessés de guerre, n'importe qui connaissant les capacités des mages savait qu'avoir affaire à des hommes ayant perdu leur bassin et en dessous n'était pas impossible.

C'est avec une appréhension non dissimulée qu'elle demanda à sa fille de lui apporter diverses plantes et onguents, tandis que la femme d'âge plus si mur s'attelait à étudier la blessure de manière à se montrer la plus efficace possible.

Au terme de longues secondes d'analyse et de préparation de tissus et autres bandages, l'herboriste coupa le bois de la flèche à l'aide d'une pince utilisée pour couper les branches, ceci de manière à ne pas "éparpiller" le bois de la flèche qui aurait résulté d'un pliage et rendu difficile l'extraction. Elle coupe le plus près possible du cou de façon à ce que Kantz n'ait pas à supporter une extraction trop longue.

Après une inspiration, s'est assistée de sa fille qu'elle se mit à tirer lentement sur la pointe de la flèche, l'enlevant lentement pour ne rien abîmer de plus chez Kantz qui subissait de son coté une douleur atroce qui avait le mérite de le tenir éveillé.

- Tenez bon jeune homme!

Le sang recommença instantanément à couler lorsque l'orifice causé par l'entrée de la flèche fut libéré du bois qui l'obstruait, la fille de l'herboriste s'affaira à contenir le liquide chaud et rouge qui coulait à l'aide de tissu précédemment préparé tandis que du coté de la patronne la flèche finissait d'être extraite, ce qui causa pour le patient une libération autant qu'une douleur, mais Kantz pouvait se rendre compte d'une chose: il n'avait pas de mal à respirer, pas plus que le mal causé par l'extraction en tout cas. Ce qui signifiait que le sang ne coulait pas dans ses voies respiratoires et qu'elles n'étaient donc pas touchées.

Les deux femmes entreprirent par la suite d'endiguer la nouvelle hémorragie tout en passant des onguents et autres extraits de plantes de manière à la stopper. Elles n'étaient pas alchimistes et une troisième potion hirondelle aurait pu avoir raison du patient, mais elles ne savaient rien des soins précédemment administrés.

Finalement, l'hemorragie fut stoppée au prix de nombreux tissus. Il s'agissait désormais de désinfecter et de soigner à proprement parler, ce qui fut fait avec d'autres pommades faites de plantes non magiques. La blessure ne pourrait plus s'infecter et de l'onguent fut appliqué afin que le tout cicatrise.

Kantz était sorti d'affaire, difficile de dire pour l'instant quelles séquelles il aurait de cette mésaventure.

Alors que sa mère s'éloignait pour s'occuper d'autres blessés affluents dans l'enseigne, dont le sol serait bientôt plus fait de linceuls blancs et entachés de rouge que de bois, Elia s'approcha de ce garçon dont la vie était épargnée - du moins, si cette bataille dont elle ne savait pas grand chose était gagnée -. Doucement, elle vint caresser le front du jeune sorceleur, et de sa dextre lui tint la sienne.

- Tu peux dormir si tu le souhaites, tu as été valeureux jusqu'à maintenant...

Une voix douce, Kantz n'avait pas dû espérer entendre pareil timbre au milieu de ce chaos. Chaos qui était imprégné ici même, avec les cris de de douleurs, d'agonies, de demande d'aide etc. Pourtant, la voix se distinguait, et sans doute que dans son état, Kantz avait l'impression d'entendre qu'elle.

Vivant, il l'était pour l'instant, une chance par rapport à certains hommes ici qui ne passeront probablement pas la nuit, si on partait du postulat que la bataille était effectivement gagnée. Pourtant il oscillait toujours entre la réalité et ce monde parallèle que seul les blessés pouvaient voir lorsqu'ils étaient en proie à divers hallucinations. Notamment à l'instant où la fille de l'herboriste que sa conscience au loin n'avait peut être jamais vu auparavant se tenait à son chevet. Ses yeux anthracites s'étaient posés sur celle-ci mais rien n'indiquait qu'il semblait lucide à ce moment, au contraire même: son esprit arrivait à entendre au loin cette douce voix pareille à un chant et ignorait le chaos ambiant.

-Et ... êtes vous un ange ?

L'impression d'être arrivé dans les Grandes Plaines de lumière était presque si réelle qu'il jurait voir une aura scintillante et chaleureuse déborder de la jeune femme.

Un soufflement du nez et puis un rire cristallin échappa des lèvres de la jeune fille. La situation ne prêtait pas à rire, mais le sourire sur un visage, valait meilleur soutien parfois que celui de l'égide brandi contre les flèches. Pour ne pas pleurer de cette situation, bien qu'elle craignait le pire au vu de l'agitation des dehors, Elia rit, doucereusement.

- Cela me conviendrait de l'être, mais je ne suis malheureusement qu'une fille dans notre horrible réalité.

Des mots qui contrastaient avec la pensée... Elle ne put se résoudre à ne pas souligner le catastrophique de la situation, d'une manière ou d'une autre. Toutefois, cela ne résonnait guère que d'une façon : la remarque satyrique qu'un humain quelque peu lucide pouvait faire pour donner légèreté à un contexte mille fois trop pesant. La phrase se termina par un sourire sobre dans l'étendu, mais chaleureux dans la profondeur.

Le son cristallin de la voix de l'apprenti herboriste raisonnant dans ses oreilles, comme l'écho des montagnes, était porteur de bonnes nouvelles: le jeune nilfgaardien n'était pas encore arrivé dans les vastes plaines de lumière, bien que la sensation d'y avoir poser un orteil était encore présente, l'aura lumineux ne cessant d'émettre sa chaleur douce et apaisante.

-Vous m'avez sauvé la vie alors ...

Sa main toujours dans la sienne, comme un marin s'accrochant à la lumière d'un phare par la tempête, son cerveau n'était pas exempt de tout reproches quant à ses capacités d'analyses et de déductions, le revers de la médaille. Cependant le peu de lucidité qui le traversait par moment était largement suffisant pour lui faire comprendre certaines choses, les plus importantes du moins: celles qu'il fallait absolument s'approprier en cet instant trouble, il devait la vie à cet jeune femme et à sa mère.

-J'ai peur de m'endormir, vo ... vous voulez pas restez avec moi ?

Une demande bien égoïste au vu de l'endroit où ils se situaient, mais Kantz n'aurait pas le loisir de se laisser aller par les remords, ses yeux s'étaient lentement clos et la brume de son âme dissipée: le petit mutant venait de rejoindre le doux pays des songes.

Elia continue de sourire, en alternant sa senestre sur le front de Kantz, avec un tissu imbibé d'eau froide, le garçon étant brûlant.

- Ce sont tes camarades qui t'ont amené ici, aux côtés de ma mère, je n'ai fait que très peu tu sais...

Répondit-elle d'une voix légèrement absente. Un élan de modestie adressé en aparté, comme si elle n'attendait pas du gisant, une quelconque compréhension de la situation, ou même d'un souvenir de cette discussion, une fois qu'il aurait fermé les yeux.

Elia, naturellement chaleureuse, resserra l'étreinte de la main pour faire perdurer le petit hameau onirique dans lequel semblait s'être perdu le blondinet. La jeune fille vit son sourire s'accentuer aux mots du garçon, il y avait dans les expressions de son visage un subtil cynisme qu'on ne trouvait guère aisément chez personnes si jeunes... La fille de l'herboriste, n'était, en effet pas, de ceux pleurant l'ô accablant malheur qu'était la vie dans ce si cruel monde. Enfin, ce que cela représentait profondément Kantz n'aurait pour le moment pas l'heur de le comprendre puisqu'il s'échappait dans le monde des rêves, peut-être viendrait-ce un jour ?

- N'aie pas peur de t'endormir, je veillerai sur... Ha ?

Fit-elle se rendant compte que le garçon s'était endormit. Un subreptice soupir d'amusement échappa de son petit nez, et Elia relâcha doucement l'étreinte des mains, et laissant le tissu froid sur le front, ira aider sa mère pour la suite : d'autres blessés arrivaient. Et d'autres événements se déroulèrent les minutes suivantes, faisant résonner le chaos dans les rues adjacentes, Elia se sera précipiter pour le voir, ce reptile gigantesque, puis après la descente de l'angoisse, reprendra son labeur sans relâche; il fallait faire confiance en les hommes et les femmes s'étant dressés pour protéger la ville.

Ce fut, pour une fois, quelqu'un qui parvenait à marcher seul et à qui ne ne manquait ni bras ni dent qui arriva dans la "boutique", quelqu'un de non blessé en somme. Le crépuscule faisait alors son oeuvre.

- Bonsoir. Quelques mots glissés sobrement tandis qu'il cherchait quelqu'un de son regard terne et incroyablement détaché.

Le jeune homme semblait avoir fait quelques roulades dans les champs au vu de ses vêtements, autre fait à noter: il était noirci à plusieurs endroits, tant sur ses vêtements que sur son visage, comme si il avait traversé les flammes.

- Nous vous amenons d'autres blessés, ils sont sur la place principale. L'un a probablement les genoux brisés, pour le reste j'ignore leurs maux. Le grand sorceleur balafré a des potions régénérantes pour sorceleurs, au cas ou.

Qui, à son ton dénué d'empressement laissait soit présager que ces autres maux n'étaient pas graves, soit que le xanthe n'en avait cure.

- Je vous laisse à votre oeuvre, merci.

Les informations qu'ils devait communiquées ayant été délivrées, il commence à s'en aller, assez lentement pour écouter une éventuelle réponse cependant.